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Ateliers d'étude du Shôbôgenzô avec Yoko Orimo
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Ateliers d'étude du Shôbôgenzô avec Yoko Orimo
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19 janvier 2014

5ème cours de langue japonaise (13/01/2014). Lectures on et kun et conséquence pour les sûtras

Pour lire, télécharger, imprimer c'est ici en fichier docx : 5eme_cours_japonais ;

et en fichier pdf : 5eme_cours_japonais .

 

5ème cours d'initiation à la langue japonaise

Par Yoko Orimo

 

Voici la transcription d'une grande partie du cours qui a eu lieu à l'Institut d'Études Bouddhiques le 13 janvier 2014. Ce n'est pas dans l'ordre où cela a été traité, et les exemples de phrases ne sont pas toujours celles qui ont été vues en cours. Le passage de l'oral à l'écrit nécessite des modifications, certaines interventions ont donc été légèrement modifiées.

Juste après la bonne année il est question des deux lectures on et kun (phonétique et explicative) ainsi que de la lecture des sûtras. Un passage de la leçon inaugurale de J-N Robert a été ajouté parce qu'il concerne un mot d'un exemple donné par Y. Orimo.

La fin (tableaux d'exemples de questions, vocabulaire de la famille) ne se trouve que sur les fichiers docx et pdf.

                                                                                                                   Christiane Marmèche

Bonne année :

Je vais vous apprendre comment on dit "Bonne année" en japonais. Et je vous invite d'abord à mémoriser un mot qu'on utilise pour souhaiter la nouvelle année, mais qu'on peut utiliser aussi envers quelqu'un qui vient de réussir un examen, ou pour un mariage, donc pour tous les souhaits ou félicitations : omedetô (おめでとう).

Quand on est poli, en particulier dès que c'est un peu officiel, au bureau, il y a une terminaison de politesse qu'on ajoute à la fin : gozaimasu (ございます).

Pour préciser qu'il s'agit de la nouvelle année on met au début akemashite (あけまして) qui signifie qu' une nouvelle année commence. Ça a le sens de "se lever", comme on dit que le jour se lève.

D'où cette formule : Akemashite omedetô gozaimasu.

Il y a une autre formule qui veut dire la nouvelle année, c'est shin.nen (しんねん) où shin veut dire neuf, nouveau, et nen désigne l'année.

Ce qui fait que la formule la plus longue pour souhaiter la bonne année est celle-ci :

Shin.nen akemashite omedetô gozaimasu.

しんねんあけましておめでとうございます

 

I) Lectures on et kun ; exemple de la lecture des sutras

 

Je vais dire un mot sur deux systèmes de lecture des caractères sino-japonais. La prononciation est quelque chose d'assez compliqué, et c'est pourquoi, quand vous apprenez les kanji, je ne vous conseille pas d'aprendre leur prononciation.

Je vais surtout vous expliquer la différence des deux lectures on et kun :

– la lecture on 音 est une lecture phonétique ;

– la lecture kun 訓 est une lecture explicative.

Explication sur un exemple.

Pour vous expliquer je vais prendre un exemple très simple [1].

Actuellement dans l'atelier du Shôbôgenzô nous lisons le fascicule Sansuikyô 山水経. Je vais prendre les deux premiers caractères de ce titre. Puisque san 山 désigne la montagne et que sui 水 désigne l'eau mais aussi les rivières, les fleuves, la mère, les lacs, sansui 山水 veut dire littéralement « la montagne et l'eau », et sansui désigne grosso modo la nature, mais la nature avec toute sa noblesse.

Les mots chinois sont toujours des mots composés. Lorsque les Japonais les ont introduits au Japon ils n'ont pas gardé la prononciation chinoise.

Ces mots chinois les Japonais les lisent d'une manière phonétique, mais ils les lisent aussi à la manière japonaise, et ces deux prononciations n'ont rien à voir. La première lecture est dite lecture phonétique (lecture on), et la deuxième lecture est dite lecture explicative (lecture kun) parce qu'on a converti les mêmes caractères en mots japonais.

Pour notre exemple 山水 :

sansui est la lecture phonétique (lecture on) qui correspond à la lecture chinoise ;

– la lecture explicative (lecture kun) c'est yama (to) mizu やま(と)みず. Souvent, comme ici, on introduit une particule puisque yama mizu en japonais ça ne marche pas. D'où la traduction « la montagne et l'eau ».

►  Ça veut dire que yama est un mot japonais qui existe avant que les caractères chinois ne soient importés ?

Y O : C'est ça. Quand les Japonais ont introduit les caractères chinois au VIe siècle, il n'y avait pas d'écriture au Japon. C'est un peu plus tard qu'ils ont inventé le syllabaire.

Un deuxième exemple :   [bijin / utsukushi.i hito]

Voici un autre exemple. Le mot se prononce bijin en lecture phonétique et ça désigne une jolie femme car jin désigne une personne mais la beauté est réservée à la femme.

Et les Japonais décortiquent ce mot sous la forme : utsukushi.i hitoうつくしひと, qui veut dire "belle personne", car utsukushi.i veut dire beau et hito c'est la personne [2].

Ce qui est intéressant c'est que la portée sémantique de ces deux mots est complètement différente. Le mot bijin désigne une beauté purement plastique qui n'a aucune dimension éthique ni émotionnelle : il y a une jolie femme, point. Tandis que lorsque les Japonais prononcent le mot à la manière japonaise ça peut être un homme aussi. Par exemple Nelson Mandela est une "belle personne" qui a vécu quelque chose d'extraordinaire.

Et ceci arrive assez souvent : la lecture explicative est beaucoup plus chargée d'émotions, va au-delà de l'apparence.

Ajoût : Comment traduire 美しい日本の私 utsukushi.i-nihon-no-watashi ? [3]

Le titre donné par Kawabata à son discours de réception du prix Nobel de littérature est  美しい日本の私. Il  « est presque impossible à traduire ; véritable crux interpretum, il est d’une simplicité enfantine en japonais, mais tous les efforts pour le rendre en français se révèlent artificiels, contournés, ou ridicules. 美しい日本の私 : Seidensticker a choisi de le traduire par Japan the Beautiful and myself ; je n’insisterai pas ici sur la présence ou non d’une virgule après "Japan ", elle apparaît et disparaît au gré des éditions et nous ferait alors comprendre « le Japon, le Beau et moi ». Il paraît difficile de dépasser, dans sa simplicité sans détour, la traduction que j’ai trouvée sur l’Internet et qui semble à présent emporter l’adhésion du monde virtuel : « Moi du beau Japon », mais je préférerai ici me rallier à ce que proposa jadis le regretté François Berthier : « La tradition esthétique japonaise dont je suis issu » ; presque une paraphrase, cet intitulé a le grand mérite de rendre le rapport logique, essentiel ici, entre chaque mot, et de traduire donc assez précisément ce que Kawabata annonce. Trop précisément même, car il nous donne presque – trop tôt – une clef de lecture : il s’agira bel et bien, en effet, de la relation entre une forme japonaise de beauté et l’écrivain lui-même, alors que les mots de l’original suggèrent plutôt que Kawabata entend parler de la beauté du Japon en tant que pays : « le beau Japon ». »

Un troisième exemple :  仏道 [bustsudô /hotoke no michi]

La lecture de (traditionnellement 佛) qui désigne le Buddha (l'Éveillé) est butsu en lecture phonétique, et hotoke ほとけ en lecture explicative.

La lecture de 仏道quidésigne la Voie de l'Éveillé est butsudô en lecture phonétique, et c'est hotoke no michi ほとけのみち en lecture explicative (michi c'est la voie, le chemin).

Et les nuances sont complètement différentes : butsudô c'est froid alors que hotoke no michi ça va droit au cœur. Et tout est un peu comme ça.

À l'école ; en Chine…

►  Ça se passe comment l'école ?

Y O : Les petits apprennent d'abord les kanas à l'école et ensuite, au niveau du collège, ils apprennent beaucoup de mots composés d'origine chinoise.

► Et quand vous êtes en Chine, vous comprenez ce qu'ils disent ?

Y O : Je comprends l'écrit mais la prononciation est complètement différente. Quand on veut parler avec un Chinois, en japonais on appelle ça hitsudan 筆談 : le Chinois écrit quelque chose, je comprends tout ce qu'il dit et je réponds en écrivant.

► En plus la structure n'est pas la même.

Y O : Oui. C'est-à-dire que vous, les Français, quand vous tombez sur quelque chose d'un peu compliqué, vous dites que c'est du chinois. Mais en fait, au niveau syntaxique, le chinois est beaucoup plus proche des langues européennes que le japonais. En japonais tout est inversé.

La lecture des sûtras.

N S : Dans certains sûtras qu'on récite dans les monastères zen on trouve le mot hotoke. Comment est-ce que ça s'est transformé en lecture kun ?

Y O : Justement c'est une question très importante et très intéressante. Et ça, c'est une longue histoire. En effet il y a plusieurs manières de lire un sûtra. Les moines en général ne comprennent pas le contenu du sûtra, mais prononcent simplement à l'aide de lecture phonétique qui est ajoutée sur le texte du sûtra au niveau de chaque caractère [4]. Donc, si on veut être sûr que le moine a compris le sens du sûtra, il faut faire la lecture explicative, mais ce n'est pas automatique, pour cela il faut bien connaître le sûtra. Et en plus il y a plusieurs lectures possibles. C'est d'ailleurs ce que Dôgen exploite souvent : il transforme la manière de lire une proposition.

Donc tout ceci est compliqué mais ouvre un immense horizon. C'est une aventure littéraire, philosophique etc. L'interprétation est très importante dans la culture japonaise, un peu comme dans la tradition talmudique.

A E : Je voudrais dire une chose par rapport aux sûtras. Je suis partie au Japon avec Laure qui n'est pas là ce soir. C'était au moment où il y a eu Fukushima. Nous sommes allées l'été au Japon pour aller voir notre professeur de shiatsu et aussi pour le zen. Nous n'étions que cinq à partir.

En particulier nous sommes passés au Eihei-ji le temple de Dôgen, et là nous avons pratiqué et dormi. Le moine qui nous a accueillis nous a expliqué que les sûtras se lisent maintenant plutôt en lecture explicative de façon à ce que les jeunes moines comprennent plus facilement.

Nous sommes passés dans plusieurs temples, en particulier celui de notre roshi, Hozumi. Il n'y avait plus personne en dehors de lui car tout le monde était parti à cause de Fukushima. À un moment il nous a récité tous les sûtra. Il nous a expliqué que pour lui, les textes qu'il avait étaient très précieux car ils correspondaient à la lecture phonétique, mais qu'il ne pouvait plus les lire ainsi parce que la lecture se faisait maintenant en lecture explicative.

Dans les sesshin qu'il fait en Europe Hozumi parle japonais mais c'est traduit. La traductrice est Dominique Palmé qui a traduit énormément de livres. Avant Hozumi avait tendance à mettre de "l'ancien japonais" dans les explications qu'il nous donnait le matin, et actuellement, il cherche à parler plus simplement.

►  Tout ça c'est très intéressant. Et ça fait plaisir de voir que les pratiquants du zen rinzaï commencent à être un peu plus nombreux dans les cours de l'IEB !

A E : Ça fait cinq ans que j'ai commencé à pratiquer le rinzaï. Je m'intéresse aussi au sôtô puisque je vais parfois pratiquer avec eux du fait que mon travail est juste à côté.

Y O : Je crois que ces deux écoles sont complémentaires. En effet, je vois vraiment les profondeurs de la pratique du sôtô qui ne fait qu'un avec l'éveil. Mais au Japon, les dimensions artistiques et esthétiques ont été développées par le rinzaï et pas par le sôtô. Le sôtô c'est le dépouillement complet. Et ce qui manque au zen européen – mais là ce n'est que mon opinion – c'est cette dimension artistique. Donc je soutiens la lignée rinzaï aussi.


II) Tableaux et exercices

1°) Particules vues en cours avec une partie de leur sens :

 wa 
 は 
Sujet                                                                        [sujet]
wo
COD Complément d'objet direct en général           [objet]
ga
Peut désigner le sujet avec les verbes arimasu et imasu
ni
Indique le lieu (= où)                                               [lieu]
ka
Se met à la fin pour dire que c'est interrogatif            [Q ?]
ne
Se met à la fin pour partager le sentiment              [accord]
no
Partitif possessif                                                     [relation]
to
 "avec", "et", et aussi on le met à la fin quand on reprend l'ensemble d'une proposition
te
 en fin de proposition : particule de liaison avec la proposition qui vient après

(te a été vu à l'atelier du Shôbôgenzô; ce qui est dit à la fin pour to aussi).

 

Deux exemples pour la particule to

Toi et moi

 Watashi to anata

わたし   あなた

 Je vais au cinéma avec ma sœur ainée 

 Watashi wa watashino ane to eiga ni ikimasu 

わたしわたしのあねえいがにいます

 

2°) Révision des verbes (le 1er tableau a déjà été vu)

 GROUPE A 

 indicatif 

 interrogatif 

 Impératif

 ou éventuel 

 Impératif/éventuel 

 en interrogatif

 passé

 terminaison

ます

 ますか

 ましょう

 ましょうか

 まし

 terminaison

masu

 masuka

 mashô

 mashôka

 mashita 

 

J'ai acheté 3 croissants

Watashi wa kurowassan wo mitsu kaimashita.

Moi [sujet] croissants [objet] trois j'ai acheté

私はクロワッサンをみつかいました。

 Paul achète une maison à Nice

pôru-san wa Nîsu ni i.e wo kaimasu.

Paul [poli] [sujet] Nice [lieu] maison [objet] achète

ポールさんはニースにいえをかいます。

 Est-ce que tu achètes ce livre ?

Anata wa kono hon wo kaimasu ka.

Toi [sujet] ce livre [objet] tu achètes [Q ?]

あなたはこの本をかいますか。

 Si nous achetions des gâteaux.

Kêki wo kaimashô.

Gâteaux [objet] si nous achetions

ケーキをかいましょう。

3°) Tableau de questions   

Sur les fichiers téléchargeables (en début de message) vous avez en plus un gros tableau d'exemples de questions qui mettent aussi en jeu le tableau DOKOADO.    

Où ?

doko

どこ

Qui ?

dare

だれ

À qui ?

Dare no

だれの

Quoi ?

nani (ou nan)

なに (ou なん)

Lequel (chose)

Dore

どれ

 Qui ? Lequel ? (personne) 

 Dochira (ou donata) 

どちら(ou どなた)

Qui ? Lequel ? (poli)

Dochira sama

どちら

Quel… ?

Dono…

Combien ? (prix)

(o) Ikura

(お)いくら

 



[1] Pour aller plus loin  lire la variation de Y Orimo dans son dernier livre (Tome 7 de la traduction intégrale du Shôbôgenzô), en particulier p. 259 et suivantes.

On peut aussi lire la leçon inaugurale de Jean-Noël Robert (La hiéroglossie japonaise) sur le site du Collège de France : http://www.college-de-france.fr/site/jean-noel-robert/#inaugural-lecture

[2] Dans le Tome 7 (voir note précédente) Y Orimo dit que c'est à l'époque Muromashi (1392-1573) que le mot utsukushi.i, qui était d'abord chargé d'un sens affectif et émotionnel a pris un sens esthétique et qu'il a pu être employé dans la lecture explicative du kanji bin 美.

[3] Extrait de la leçon inaugurale de J-N Robert (voir note précédente), c'est le paragraphe 17.

[4] Voir le deuxième cours où se trouve une photo du Hannya Shingyô : 2ème cours d'initiation à la langue japonaise.

 

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