La cérémonie du thé : les origines. Par Franck Armand
La cérémonie du thé : les origines
par Franck Armand*
Pratique millénaire née en Chine, la cérémonie du thé s’est épanouie au Japon. A partir du XVème siècle, elle va véritablement prendre une forme japonaise spécifique.
L’art du thé en Chine
C’est à la dynastie des Tang, l’âge d’or de la civilisation chinoise, qu’il faut remonter pour retrouver les origines de la cérémonie du thé…
Les écrits du poète Luwuh indiquent que déjà, au VIIIème siècle, le thé est passé d’une boisson ordinaire à un véritable objet de culte. Luwuh vivait dans une Chine forte, ouverte vers l’extérieur et qui cherchait à réaliser une synthèse entre Bouddhisme, Taoisme et Confucianisme ; il voyait dans le service du thé le reflet de l’harmonie et de l’ordre qui règne en toute chose.
Sous les Tang, les feuilles de thé sont broyées et transformées en un gâteau qui est alors bouilli. Sous la dynastie suivante des Song, l’art de boire le thé évolue ; il consiste à mettre en suspension dans de l’eau bouillante, une poudre de feuilles de thé finement broyées. A cette évolution technique s’ajoute une nette évolution de la philosophie de cet art. Le passe-temps poétique, certes chargé de symbolisme, que Luwuh pratiquait devient sous les Song un véritable art de vivre, un moyen d’avancer sur le chemin menant à l’illumination. A partir de cette période, on trouve très clairement les influences Bouddhistes et Taoistes.
La rébellion des tribus Mongoles au XIIème siècle aboutit à l’invasion de la Chine par les Empereurs Yuan ce qui mit fin à l’épanouissement culturel de la dynastie des Song.
La dynastie indigène des Ming tenta vainement au XVème siècle de retrouver le rituel des Song. C’est à cette période que se développe l’habitude de faire infuser les feuilles de thé telle que nous le pratiquons aujourd’hui en Europe. Rien d’étonnant à cela puisque c’est à la fin de la dynastie Ming que l’Europe découvre le thé.
A la fin du XIIème siècle un moine japonais, Yôsai Zenji, qui était allé étudier la philosophie Chan en Chine du sud, ramène au Japon des plants de thé ainsi qu’un rituel pour boire le thé. Yeisai sera le fondateur de la première école Japonaise du Zen, le Rinzai.
Dès le XIVème siècle, le déroulement d’une cérémonie de thé est déjà bien établi. Cependant, c’est un passe-temps des hautes classe sociales, des samouraïs, des nobles ; on utilise un décor à la chinoise très sophistiqué.
Puis, au XVème siècle, les espaces intérieurs japonais évoluent. On voit apparaitre l’usage systématique des tatamis, des cloisons amovibles, de l’alcôve décorative que l’on nomme tokonoma (c'est-à-dire, l’espace du toko, du rouleau de calligraphie…). L’espace pour le thé est le point d’aboutissement de cette évolution architecturale. Dans son pavillon d’argent, sur la montagne de l’est à Kyoto, le Shogun Ashikaga no Yoshimasa crée la première pièce spécifiquement dédiée à la pratique du thé. On trouve déjà dans l’atmosphère de ce lieu, la simplicité, la pureté et le calme qui caractérisent la cérémonie du thé actuelle. Peu à peu, l’espace va encore se modifier dans le détail pour se rapprocher de la cabane de l’ermite. Cette évolution sera l’œuvre de 3 maîtres : Murata Juko, Takeno Joo et Sen no Rikyu.
*Franck Armand a effectué ses études supérieures au Japon. Boursier du gouvernement japonais, il a pu s’immerger dans cette culture à travers une expérience directe et concrète. Avant son départ pour le Japon, il avait débuté une pratique de zazen qu’il a intensifié pendant son séjour. En contact avec des maitres de l’école Rinzai, il a pratiqué les arts traditionnels issus du monde Zen et en particulier la cérémonie du thé. Depuis lors il poursuit cette pratique régulièrement en France et auprès de différents maitres au Japon.
Ainsi sa pratique du bouddhisme Zen passe désormais essentiellement par la pratique de la cérémonie du thé. Actuellement, il transmet en France les principes fondamentaux de cette pratique dont il a su percevoir la portée universelle. Il le fait lors de sessions d’enseignement au pavillon de thé qu’il a construit dans le Vercors, il le fait aussi lors de sessions de thé organisées sur Paris, lors de journées de thé, lors des rencontres du thé… Depuis 3 ans, avec la sortie de son ouvrage « la cérémonie du thé, un art de la relation » il tente par petits pas d’introduire cette pratique dans le monde de l’entreprise en particulier dans le cadre de formations en gestion des conflits. C’est dans ce cadre-là qu’une rencontre avec Patrick Ferrieux a permis de lancer le groupe « éthique spirituelle en entreprise ». Ce groupe a d’ailleurs déjà présenté ses activités lors d’une conférence au Dojo Zen de Paris.
Parallèlement, Franck enrichit son cheminement spirituel dans le bouddhisme grâce aux enseignements de Mila Kyentsé Rimpoché, un Tulku occidental qui enseigne en France et en Europe….
Franck Armand est l’auteur de « La cérémonie du thé, un art de la relation », 2010, Ed J-C Godefroy. Les activités qu’il propose sont détaillées sur www.mirokou.com